Felix Luque – Perpétuité II
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Dans Perpétuité II, nous avons détourné un robot industriel venant de l’industrie pharmaceutique automatisé, de l’industrie de « pick & place », pour en faire une créature soumise à un algorithme qui génère en temps réel une tache infinie et titanesque.
Cette performance n’existe que sur un temps particulièrement long, une temporalité qui échappe à celle des visiteurs. Le robot doit chercher et déplacer des milliers des pilules pharmaceutiques (antidépresseurs) de couleurs pour dessiner les données générées par un programme informatique.
Ce logiciel composé d’une série d’algorithmes simule de manière synthétique, les processus génératifs des synapses. Le résultat est une série des tableaux formés par des milliers des pilules, telles des points des couleurs, qui représentent un processus évolutif sans fin.
Cette tâche algorithmique devient, dans l’espace d’exposition, une performance anthropomorphe ou le numérique et le naturel, le synthétique et l’humain, la chorégraphie et la répétition, la fluidité et la matrice, le robot et l’araignée, s’entremêlent.
Nous sommes face à notre disparition, au moment où nos créations technologiques, nos machines nous dépassent comme des maîtres de la répétition, du travail collaboratif, des données et du calcul.
Mais elles remplacent également Sisyphe, condamnées comme lui à reproduire et défaire une tâche à perpétuité.
Les robots industriels sont conçus pour réaliser des tâches répétitives avec des mouvements d’une précision quasi absolue. Ils les réalisent sans fatigue, sans repos, sans aucune perte de concentration et sans aucune hésitation. C’est la maîtrise de l’automatisation, une symphonie synchronique.
Dans la série d’installations “Perpétuité”, l’humain a disparu suite à l’accomplissement de ce rêve technologique.
Il n’a ainsi plus de raison d’être. Les robots sont laissés à eux-mêmes dans des tâches sans fin.
Dans “Pourquoi tout n’a-t-il pas déjà disparu ?” Jean Baudrillard écrit “N’avons-nous pas le phantasme profond, depuis toujours, d’un monde qui fonctionnerait sans nous ? La tentation poétique de voir le monde en notre absence, exempt de toute volonté humaine, trop humaine ?”
Dans le monde actuel qui devient hyper-connecté, hyper-automatisé et hyper-contrôlé par des algorithmes, nous imaginons à la manière de Baudrillart, une vision où l’humain aurait disparu et les objets techniques abandonnés à eux-mêmes, continuent à exister sans lui.
Le projet est une tentative de matérialiser métaphoriquement ce nœud vicieux existant entre “l’hyperproduction”, l’humain et l’objet technique moderne.
Credits
Perpétuité II by Félix Luque, Vincent Evrard & Damien Gernay
Perpétuité II is a coproduction of “secteur arts numériques, Fédération Wallonie-Bruxelles”, "Chroniques 2022 (Biennal of Digital Imagination)” and iMAL.